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Livre

Catadioptre

Catadioptre, deuxième livre de Linn Molineaux est à paraître. Linn est le lauréat 2020 de la bourse d’aide à l’écriture Nouvel·le Auteur·e du Canton de Genève ainsi que de la bourse de littérature de la Fondation UBS pour la Culture qu’iel reçoit en 2021.

Catadioptre est né d’un vide, d’une absence de mots. De la volonté d’écrire sur l’après d’un évènement traumatique. Quelque chose de très tangible se vit dans l’expérience de la survie, dans ce moment où la vie vacille, quand s’opère en soi le choix d’aller – ou non – de l’avant, de continuer. Mais là, le langage manque, quelque chose d’insaisissable se joue là, lorsque l’existence trébuche, qui ne se dit pas et peine à s’entendre. Il n’y a pas de discours pour dire pourquoi on s’accroche, pourtant c’est très réel. De la même manière, il n’y a pas de transmission lorsque quelqu’un d’autre se retrouve dans une situation similaire. On ne donne pas à voir à quelqu’un qui s’effondre ce que l’on a trouvé qui nous tire en avant, chacun doit en faire l’expérience pour soi.

Comme le livre prenait forme, il y a eu une rencontre. Une vieille dame, cinquante ans d’écart avec moi. Dans le livre, c’est l’ange. Elle a offert son récit de femme militante, elle qui a façonné l’histoire des femmes et du féminisme à Genève. Elle vit maintenant pour l’art, pour la quantité fabuleuse de spectacles qu’elle va voir. Elle a livré son histoire à l’auteure, sa vie. Elles ont ensemble été explorer ce que deux femmes, l’une jeune, la vie devant soi et l’autre âgée ont à se dire, du sens qu’il y a à tisser entre deux expériences de vie qui se croisent sur de nombreux territoires. L’auteure a puisé dans son récit de vie un contexte plus large et inscrit son récit individuel dans l’histoire de Genève et des femmes d’ici.

Il s’agit aussi d’aller se réapproprier la narration de soi. Le regard fait le récit et en cela la création charrie un pouvoir profondément transgressif. L’auteure croit en cette puissance vitale de la création, cette expérience humaine de la voix qui s’échine à faire sens et porte une capacité merveilleusement rassembleuse. Catadioptre embrasse cet élan jouissif, ses doutes aussi.

C’est un livre en devenir qui se veut une expérience poétique non pas de la violence mais de son après, de la vie avec, de la force vitale, du désir irrépressible. Une quête de légèreté et de souffle après l’écrasement et la lourdeur. C’est un livre porteur d’espoir par son constat : la violence, dans tout son déchirement et son absurdité ne parvient pas à éteindre la beauté, petite ou grandiose, partout donnée. L’effort c’est d’en collecter les traces, de se rendre disponible à elle, de laisser exploser ce désir incandescent. Un Catadioptre, c’est un miroir qui renvoie la lumière dans la direction de sa source.

Les récits du témoignage de l’ange et ceux d’instants capturés par l’auteure s’entremêlent et dressent un portrait de femmes contemporaines, en lutte, survivantes et bien vivantes, émerveillées, en quête de cette insaisissable poétique qui nourrit l’être.